Faire face aux futures menaces de pandémies affectant les programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme: Préparation et riposte aux pandémies
La préparation et la riposte aux pandémies (PRP) figurent désormais en tête des priorités de la politique mondiale de la santé. L’impact économique et social dévastateur actuel de la pandémie de COVID-19 a démontré que le monde n’est toujours pas en mesure de se préparer efficacement à une pandémie émergente, de la prédire, de la prévenir, d’y faire face ou de s’en remettre.
Compte tenu de la tendance actuelle, le Groupe indépendant sur la préparation et la riposte à la pandémie a recommandé que ” l’Assemblée générale des Nations unies joue un rôle clé en veillant à rendre le système international mieux à même de répondre aux futures menaces de pandémie “.
Des discussions similaires se tiennent actuellement dans le cadre de la stratégie post-2022 du Fonds mondial (FM)[1] et un consensus a été dégagé sur la nécessité d’intégrer la PRP dans les programmes de lutte contre le VIH, la tuberculose et le paludisme, afin de renforcer la résilience des programmes de lutte contre les maladies et de consolider les systèmes de santé et les systèmes communautaires en prévision d’éventuelles pandémies.
Dans ce contexte, le financement de la PRP a également suscité des débats car la majorité des circonscriptions du FM sont opposées à l’idée que la PRP constitue un axe de travail parallèle et concurrent de la programmation en matière de lutte contre le VIH, la TB et le paludisme.
Quelle que soit la place qu’occupera la PRP dans le cadre stratégique, et compte tenu du fait que les pays africains sont déjà handicapés par un système de santé faible et des déficits criants en matière de financement dans le domaine de la santé, il est nécessaire de procéder à des échanges de points de vue afin d’identifier les insuffisances actuelles et les domaines d’intervention des stratégies liées aux mécanismes de lutte contre les épidémies et à la PRP sur lesquels l’accent doit être mis. C’est dans ce cadre que le Bureau de la circonscription africaine pour le Fonds mondial a organisé une session de café virtuel sur la préparation et la riposte aux pandémies.
Lors de cette session interactive qui s’est tenue le 27 juillet 2021, des experts dans les thématiques concernées dont des participants de l’African Risk Capacity (ARC), de l’OMS/AFRO, du Ministère de la Santé du Kenya, et des membres du conseil d’administration du BCA, ont partagé leurs points de vue sur les domaines prioritaires pour le renforcement de la PRP sur le continent.
Les principales leçons retenues dans la mise en œuvre de la stratégie de préparation et de riposte à la COVID-19 dans les circonscriptions africaines[2] ainsi que les recommandations politiques pour le Fonds mondial ont fait l’objet de discussions.
Lors de ces discussions, les participants ont souligné que la préparation par le biais de l’amélioration de la surveillance des maladies, l’investissement dans les systèmes de santé et les capacités humaines dans des domaines tels que les centres d’opérations d’urgence, l’amélioration des laboratoires, les établissements de santé de première ligne et les systèmes de données interopérables pourraient jouer un rôle fondamental. En outre, la coordination entre tous les secteurs avec des équipes d’intervention ayant reçu une formation adéquate et disposant de ressources suffisantes, l’amélioration des systèmes de gestion de l’approvisionnement permettant de garantir la disponibilité des produits de base en temps opportun ainsi que l’exploration de méthodes innovantes de financement de la riposte aux épidémies, telles que les transferts de risques et les assurances pour les épidémies, pourraient contribuer à mieux faire face aux épidémies.
Il a également été suggéré que les gouvernements investissent dans les infrastructures et les capacités humaines pour la modélisation des maladies, les prévisions d’épidémies, la réduction de la dépendance du continent vis-à-vis de l’aide extérieure en soutenant la fabrication locale de produits, comme moyens de gestion des risques.
On ne saurait parler de PRP ou de sécurité sanitaire sans évoquer le Règlement sanitaire international (RSI) de 2005[3] dans lequel la communauté internationale a convenu d’améliorer la détection et la notification des urgences potentielles de santé publique dans le monde. En fait, le règlement exige que tous les pays aient la capacité de détecter, d’évaluer, de notifier les événements de santé publique et d’y répondre.
C’est dans cette optique que les experts de la session de café sur la PRP ont rappelé que plus de 40 pays de l’OMS AFRO ont mené une évaluation externe conjointe dans le but de déterminer dans quelle mesure les pays pouvaient mettre en œuvre les diverses recommandations techniques du RSI.
En conséquence, le Kenya et quelques autres pays ont élaboré un plan d’action pour la sécurité sanitaire. Alors que la plupart des pays africains sont encore loin de l’atteinte des objectifs du RSI, le Dr Kadondi Kasera, responsable du mécanisme national de riposte à la C19, a souligné que “la COVID-19 a suscité l’intérêt des gouvernements dans un domaine auquel peu d’attention avait été accordée jusqu’à présent, et qui était plutôt négligé “.
Malgré le faible investissement dans la PRP et le manque d’intérêt politique pour celle-ci, il convient de noter que la rapidité de la réponse du continent africain à la COVID-19[4] a déjoué les sombres prédictions selon lesquelles l’Afrique pourrait être l’épicentre des décès dus à la pandémie. Les taux d’infection, de mortalité et de guérison montrent que l’Afrique est la deuxième région du monde la moins touchée, grâce notamment à une réponse régionale coordonnée et à l’adoption rapide de mesures de santé publique, en s’inspirant dans certains cas des leçons apprises dans le cadre de la lutte contre Ebola.
Les pays africains doivent donc s’appuyer sur cette force pour atteindre pleinement les objectifs du RSI (pouvoir détecter, évaluer, notifier, répondre), et les partenaires mondiaux tels que le Fonds mondial doivent aider les pays à passer d’un état d’esprit réactif à un état d’esprit proactif qui soit en adéquation avec les investissements des gouvernements nationaux dans le renforcement des systèmes de santé (RSS), afin de mieux contribuer à la lutte contre le VIH, la TB et le paludisme.
Pour renforcer les systèmes de surveillance, il est important que les pays investissent dans les données numériques en temps réel, dans la capacité de détection et dans la formation des travailleurs de première ligne en vue de détecter rapidement les épidémies et d’y répondre. En outre, l’intégration des systèmes communautaires pour assurer la détection et la riposte, ainsi que le renforcement des systèmes de laboratoire et des capacités de diagnostic est essentielle. L’accélération de la nationalisation des objectifs du RSI et l’allocation de ressources suffisantes pour un système de santé résilient dans le cadre d’un soutien adéquat de la part de partenaires tels que le Fonds mondial pourront très probablement permettre aux circonscriptions africaines de résister à la pression en cas de pandémies futures.
[1]Des discussions similaires sont actuellement menées dans le cadre de la stratégie post-2022 du Fonds mondial (FM).
[2]Principales leçons apprises de la mise en œuvre de la préparation et de la riposte stratégiques à la COVID-19 dans les circonscriptions africaines
[3] Règlement sanitaire international (RSI) de 2005
[4]Réponse rapide du continent africain à la COVID-19