Le Bureau de la circonscription africaine pour le Fonds mondial (BCA) a organisé un événement parallèle sur le dialogue politique concernant la promotion de la fabrication locale de produits de santé en Afrique en marge de la 2ème Conférence internationale sur la santé publique en Afrique (CPHIA). Au cours de l’événement qui s’est tenu le 14 décembre 2022, le dialogue a été alimenté par des panélistes issus des ministères de la santé, des communautés économiques régionales, des institutions internationales et des initiatives spécialisées dans le domaine de la fabrication locale de produits de santé. La réunion avait pour but de contribuer aux discussions préliminaires et de guider les délibérations prévues en 2023 pour les experts qui mèneront des réflexions sur un projet de déclaration de position pour l’Afrique et ses implications pour le façonnage des marchés de prochaine génération.
En effet, 95 % de tous les médicaments utilisés en Afrique sont importés et le continent ne produit que 3 % de tous les médicaments produits dans le monde. Cette situation représente une menace existentielle pour la sécurité sanitaire de l’Afrique, comme l’a souligné le Dr Stephen Karengera, directeur du Centre d’excellence régional de la CAE pour les vaccins, la vaccination et la gestion de la chaîne d’approvisionnement sanitaire. En outre, la dépendance vis-à-vis des importations fait de l’Afrique un acteur passif sur le marché, comme l’a expliqué le Dr Gerald Macharia, vice-président de la Clinton Health Access Initiative, qui a souligné que “nous sommes la seule demande qui n’a aucun contrôle sur l’offre”. L’événement parallèle a donc constitué une plateforme propice à la prise de parole des Africains sur ce sujet.
La question de la fabrication locale figure sur l’agenda de la santé mondiale depuis des années. Cependant, la création d’un environnement propice à la production effective de produits de santé est toujours à la traîne. Il est indéniable que de nombreux défis existent, parmi lesquels le manque de leadership au niveau gouvernemental, la préqualification de moins de 1 % des fournisseurs africains par l’OMS, le manque d’expertise sur le continent et l’incertitude concernant l’impact des politiques régionales telles que l’accord de libre-échange avec l’Afrique sur la fabrication locale.
Malgré ces goulots d’étranglement, des progrès ont été visibles l’année dernière grâce au lancement et à la création de l’Agence africaine du médicament et de la Fondation africaine pour la technologie pharmaceutique. Ces institutions font certainement avancer le programme de fabrication locale. Toutefois, la coordination entre ces initiatives et d’autres est indispensable pour concrétiser la vision de parvenir à une cohérence et à une harmonisation des politiques réglementaires, et permettre ainsi de façonner durablement les marchés africains.
Les participants à la réunion ont formulé des recommandations sur la voie à suivre pour concrétiser la fabrication locale de produits de santé. Ainsi, les questions qui nécessitent une attention particulière comprennent une plus grande implication du secteur privé, l’agrégation de la demande continentale, le leadership du gouvernement, la pré-qualification, la coordination et la cohérence des politiques entre la santé, le commerce, les finances et d’autres secteurs critiques, un écosystème propice qui comprend des régimes fiscaux favorables, l’investissement dans la recherche et le développement, le renforcement des capacités et l’inclusion des jeunes dans le discours politique, entre autres. Il est important que l’Afrique dispose, pour sa consommation, d’un quota garanti de produits de base provenant du continent.
Enfin, la discussion sur ce sujet a également porté sur la priorisation de la fabrication de produits de santé considérés comme essentiels pour le continent, en garantissant la qualité des produits et, dans cette optique, changer la perception négative des communautés relativement aux produits locaux. Un appel a été lancé à l’Union africaine pour qu’elle continue de diriger le processus d’harmonisation des politiques de réglementation et de coordonner les discussions dans ce domaine qui est un secteur essentiel apportant de la valeur ajoutée non seulement à la pérennité des programmes de santé, mais également à la croissance économique.